Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article HARPAGÉS GRAPHE

IIARPAGÉS GRAPIIL (`Ao7rayrç -Lucien, dans un de ses premiers opuscules, suppose qu'un procès s'est engagé, sous l'archontat d'Aristarque, entre deux consonnes, le sigma et le tau, à raison d'une spoliation violente dont le tau s'est rendu coupable au détriment du sigma. Le tau, qui a décidément à coeur de remplacer toutes les autres consonnes, veut dépouiller avec violence HAR. le sigma de quelques mots qui lui appartiennent encore, etce dernier formule ses griefs devant un tribunal formé des sept voyelles. L'action intentée est une â, ay=rç ypv. r' . Y a-t-il eu réellement, en droit attique, une action, nommée p7cryri; ypxur„ pour arriver à la répression de l'enlèvement avec violence (uerx (liaç âc?xipcrtç) d'une personne ou d'une chose ? De nombreux textes prouvent que l'enlèvement avec violence d'une personne autorisait la mise en mouvement d'une action privée, la BIAIÔN DIKù, dont nous avons précédemment parlé (t. 1, p. 706). Mais la peine pécuniaire de l'enlèvement avec violence d'une femme libre pouvait paraître insuffisante, eu égard à la gravité de la faute. L'ordre social exigeait aussi quelquefois que toute personne fût admise à poursuivre la répression du délit. Une action publique était, sinon absolument nécessaire, au moins très utile dans beaucoup de cas. Mais fallait-il ajouter une ypx?r, portant un nom particulier, à toutes les ypa?ai existant déjà? L'üGEEwç ypz~ o ne suffisait-elle pas pour arriver au but que l'on désirait atteindre? Grâce aux termes très compréhensifs de la loi sur l'uep;; l'auteur du rapt pouvait être condamné à une peine très sévère, même à la peine de mort'. Une action spéciale, dite .,7.2,fi~ç ypxc?r, n'eût pas rendu de grands services à la société. Si des personnes nous passons aux choses, nous devons reconnaître que les Athéniens n'ont jamais confondu le vol simple (x oizri) avec le vol accompagné de la circonstance aggravante de violence (ç;-,xyr,). L'antithèse entre les deux délits est nettement marquée par Aristophane et par Platon' ; ce dernier applique à chacun d'eux un qualificatif différent. Mais il ne s'ensuit pas qu'il y eût à Athènes, à côté de la x),07.r,ç ôirri, tendant à la répression du vol simple, une p ay~ç yp2, tendant à la répression du vol avec violence. Jamais les orateurs ne font allusion à une action publique ainsi nommée. Quand ils veulent opposer aux voleurs simples, aux r.),7rcxt, des voleurs avec circonstances aggravantes, ils appellent ces derniers ),el7coi z;°, et l'on peut en conclure que le vol avec violence donnait ouverture à la ),w7[oôu0'(2ç ou ),w7rs uriou ypIX(?l'). Ces éliminations faites, on doit se demander à quels actes s'appliquerait bien l'p-iay11ç ypa(fr. Le législateur athénien avait-il institué quelque action spéciale pour punir le citoyen qui se faisait justice à lui-même en dépossédant violemment un autre citoyen d'une chose sur laquelle il croyait avoir des droits préférables à ceux du possesseur? Reprendre son bien par violence, au lieu de s'adresser à la justice, n'est-ce pas troubler gravement l'ordre public et renoncer à un des bienfaits de la civilisation pour ressusciter un régime de guerres individuelles? Voilà pourquoi Louis IX, dans son ordonnance de 1270, édicta des peines contre les spoliateurs, même quand ils étaient légitimes propriétaires de la chose enlevée, lorsqu'ils s'avisaient de reprendre, les armes à la main, leur chose entre les mains du détenteur, si peu digne d'intérêt que fût ce détenteur, lors même HAR qu'il eût été un effronté larron, digne du gibet. On admet généralement que la BlATÔN DIKÈ était bien suffisante pour réprimer tous les abus commis dans l'exercice d'un droit'', et l'on écarte encore, comme ne répondant pas à une réalité du droit athénien, la ypac?-r, p7f«y7iç de Lucien 8. Nous avons déjà fait observer que, de même qu'il y avait, à Rome, à côté de l'action privée vi bonorum raptorum, une action publique fondée sur le crime de violence, de même il pouvait y avoir, à Athènes, à côté de la f3txicov ôir.,;, une action publique fondée sur la violence, cette (3(q yoxc?i, dont Lucien a parlé La dualité d'actions tendant à la répression de faits de violence devrait d'autant moins surprendre qu'on rencontre pareille dualité pour le cas de vol et pour le cas de voies de fait. Solon avait voulu, dit Plutarque, que les citoyens, membres d'un même corps, souffrissent tous du mal d'un seul; lorsque l'un d'entre eux a été victime d'une violence, les autres doivent sentir l'injure aussi vivement que la victime et peuvent en poursuivre la réparation10. Nous devons toutefois reconnaître que notre argumentation n'a pas convaincu M. Lipsius. Le texte même de Démosthène, qui oppose le cas où une personne a suivi la foi d'une autre au cas of] cette personne a souffert d'une violence, et qui veut que dans le second cas la défense ait un caractère public qu'elle n'a pas dans l'autre hypothèse ne lui semble pas favorable à notre opinion 12. E. CAILLEMER. IIARPAGO (°Ao7ta.; p7nion, xpexypa, ))(jxoç, s,xur s o). 1. Griffe, instrument muni de crochets'. On en possède de semblables, généralement composés d'une tige qui est terminée par une douille destinée à recevoir un manche en bois ; cette tige fait corps avec un anneau central' autour duquel sont disposées des dents recourbées, en nombre impair, généralement cinq, quelquefois sept. On a découvert beaucoup de ces crochets dans les nécropoles des environs de Bologne et dans l'Étrurie proprement dite; ils sont le plus souvent en bronze, mais on en a trouvé entièrement en fer 3. Quelquefois les deux métaux sont employés dans un même instrument, la tige et l'anneau central étant en bronze et les griffes en fer'. Ces crochets sont souvent ornementés; la tige torse est réunie à la douille par une tête de serpent, et à l'anneau central par une gueule de lion; la base des griffes est formée d'une tête de serpent D'autres crochets, qui paraissent d'époque plus récente, portent à l'extrémité de la tige, voisine de l'anneau et perpendiculairement à celle-ci, une baguette terminéepar un crochet, un anneau ou une pointe, et garnie elle-même d'une ou plusieurs dents plus petites IIAR 12 HAR On attribue plusieurs destinations à ces crochets. L'opinion d'aprèslaquelle ils auraient servi d'instruments de supplice pour déchirer les chairs des martyrs chré tiens est généralement abandonnée. Alessandro Castellani a rapproché ces crochets des fourchettes dont se servent les pêcheurs napolitains pour pêcher à la lumière, en plaçant de l'étoupe enflammée entre les griffes'. Mais c'est plutôt dans l'intérieur des terres qu'on trouve ces crochets, et on les rencontre presque toujours à côté d'un gril, de pelles, de pincettes, etc. C'est pourquoi Schulz, dès 1835, considérait ces crochets comme des ustensiles de cuisine 2 et plusieurs savants se sont rangés à cet avis'. Des textes où des crochets ou fourchettes à viande sont appe lés xpsciypa, &e7rciyr, )Iûxo;, peu vent être cités à l'appui Le crochet servait soit à maintenir la viande au-dessus du gril, soit à l'enlever, soit à retirer du chaudron les morceaux qui étaient cuits. Un vase à figures rouges du style sévère, conservé au musée de Berlin 5, confirme cette explication. Il représente (fig. 3703) Médée rajeunissant, en présence d'une fille de Pélée, un bélier haché en morceaux et contenu dans un chaudron; la magicienne tient de la main droite baissée un crochet à cinq dents. On voit encore nettement l'usage de la xrezyFa sur une ciste de Préneste 0. On y remarque plusieurs personnages occupés à faire la cuisine et l'un d'eux tire d'une marmite, au moyen de la xpEZypa, un morceau pour le placer sur un plat qu'il tient de la main gauche. En faisant observer que les crochets trouvés en Italie ont généralement cinq dents, M. Helbig a rappelé un curieux renseignement, donné par Eustathe, d'après lequel les fourchettes à viande dont se servaient généralement les Grecs avaient trois dents, tandis que celles des Cyméens éoliens en avaient cinq'. Or, Cumes en Campanie passait pour être une colonie fondée en commun par les Ioniens de Chalcis et par les Cyméens d'Éolie 8. M. Helbig considère aussi que le crochet à cinq griffes est le 7rEU.7r(iio?ov dont on se sert dans les sacrifices décrits par Isomère 9. Cette opinion n'est pas partagée par M. Engelmann 10, qui, s'appuyant sur un texte d'Ilésychius ", considère le pempobolon comme une sorte de fourche à cinq dents droites. Pour les fourchettes plus petites à deux ou trois dents, voy. FUSCINULA. La z 6 i.ypa à une griffe ou croc, que l'on appelait des mêmes noms 12, servait à retirer les cruches et autres récipients ou tous autres objets tombés dans un puits. II. Le nom de harpago, flarpax (47rsd) a été donné aussi à un pieu muni d'un fer recourbé dont on se servait pendant un combat naval ou un siège de ville 13. Cet instrument de guerre portait encore le nom de fel'rea Manus. J.-ADRIEN BLANCHET.